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Cette montagne, connue sous le nom » Núi Vọng Phu » (ou la Montagne de la femme qui attend son mari) est située non loin de Lạng Sơn, tout proche de la frontière sino-vietnamienne. Au sommet de cette montagne se dresse un rocher rappelant la forme d’une femme debout avec son enfant dans ses bras. Cette ressemblance est étonnante lors du coucher du soleil à l’horizon. Le récit sur ce rocher est tellement émouvant qu’il devient ainsi l’une des légendes préférées des Vietnamiens et qu’il donne tant d’inspirations aux poètes vietnamiens, en particulier au compositeur Lê Thương à travers ses trois chansons Hòn Vọng Phu I, II et III. (Hòn Vọng Phu).
Autrefois, dans un village de la haute région, vivaient deux orphelins, l’un, un jeune garçon d’une vingtaine d’années et l’autre, sa sœur n’ayant que sept ans. Comme ils étaient seuls au monde, ils étaient tout l’un pour l’autre. Un beau jour, un astrologue de passage dit au jeune garçon lors de la consultation sur leur avenir:
<< Si je ne me trompe pas, vous épouserez fatalement votre sœur avec les jours et les heures de vos naissances. Rien ne pourra détourner le cours de votre destin >>.
Tourmenté par cette terrible prédiction, il décida de tuer un beau matin sa sœur en proposant d’emmener cette dernière dans la forêt pour aller couper du bois. Profitant de l’inattention de sa sœur, il l’abattit d’un coup de hache et s’enfuit. Il décida de changer de nom et de s’établir à Lạng Sơn. De nombreuses années passèrent. Il épousa un beau jour la fille d’un commerçant. Celle-ci lui donna un garçon et le rendit heureux.
Un beau matin, il trouva dans la cour intérieure sa femme en train de sécher ses longs cheveux noirs et assise en plein soleil. Au moment où celle-ci faisait glisser le peigne sur la chevelure qu’elle soulevait de l’autre main, il découvrît une longue cicatrice au dessus de sa nuque. Abasourdi, il lui en demanda la cause. Hésitante, elle commença à raconter son histoire en pleurant:
<< Je ne suis que la fille adoptive du commerçant. Orpheline, je vivais avec mon frère qui, pour des raisons inconnues, il y avait quinze ans, me blessa d’un coup de hache et m’abandonna dans la forêt. Je fus sauvée par les brigands qui m’ont revendue à un commerçant qui venait de perdre sa fille et qui avait pitié de ma situation. Je ne sais pas ce qu’est devenu mon frère et il est difficile pour moi d’expliquer son geste insensé. Pourtant nous nous aimions tellement.>>
Le mari maîtrisa son émotion et demanda à sa femme les renseignements concernant le nom de son père, celui de son frère et de son village natal. Pris par le remords tout en gardant pour lui l’épouvantable secret, il eut honte et horreur de lui-même. Il s’efforça de s’éloigner de sa femme et de son enfant en profitant de la mobilisation décrétée pour s’enrôler dans l’armée et en espérant trouver la délivrance sur le champ de bataille.
Depuis son départ, dans l’ignorance de la vérité, sa femme attendit, patiente et résignée. Chaque soir, elle prenait son garçon dans ses bras et grimpait sur la montagne pour guetter le retour de son mari. Elle faisait le même geste depuis tant d’années.
Un jour, arrivée au sommet de la montagne, épuisée et restée debout, les yeux fixés à l’horizon, elle fut changée en pierre immobile dans son attente éternelle.