Les Bahnar (Dân tộc Bà Na): deuxème partie

peuple_bana1

 

Version vietnamienne

Deuxième partie 

La dernière étape correspond au dernier jour. C’est non seulement le jour de la libération du veuf ou de la veuve mais aussi celui où on vide et on nettoie la marmite (xlah go). Un repas commun a lieu en l’honneur des invités chez l’hôte ou dans la maison communale. Puis il est suivi ensuite par un rite consistant à asperger d’eau le veuf ou la veuve ainsi que les parents du défunt par chacun des invités. Cette manifestation officialise la coupure définitive du lien des vivants avec le défunt. Dès lors, le veuf (ou la veuve) est permis de se remarier. La maison funéraire est désormais une carcasse matérielle sans âme. Elle va se décomposer naturellement au fil des années. Mais elle est d’un grand intérêt au niveau artistique et culturel car la palissade en pieux qui la clôture présente un caractère original avec les sculptures d’animaux et d’oiseaux. À l’abri du petit toit de chaume, on peut voir les armes, les vêtements, les aliments offerts à l’esprit du mort. Certaines maisons funéraires sont entourées de sculptures ayant trait à la fertilité ou à la renaissance: hommes et femmes en copulation, hommes et femmes montrant leurs organes génitaux démesurés, figures en position fœtale etc.. Ces figurines grossières ne sont pas des êtres humains mais elles sont des singes du fait qu’elles sont laides comme un singe dans le monde des esprits où tout est à l’inverse du monde des vivants. L’arête faîtière de la maison funéraire ne peut pas passer inaperçue car elle est faite avec un tronc d’arbre entier sculpté et décoré.

Pour les Bahnar, l’âme du défunt continue à vivre en tant qu’esprit dans le monde des esprits.  L’organisation de ce dernier  est semblable à celle du monde des vivants et sa souveraine est à la fois immortelle et un génie-femme nommée Brôu. Le monde des esprits (ou mang lung) est invisible pour les vivants car il se trouve soit à l’intérieur d’une grotte soit dans une forêt noire ou dans une mer très lointaine. Les esprits y vivent groupés dans les villages. Ils assument toutes les activités humaines. Ils connaissent comme les vivants le bonheur et la souffrance et ils vont mourir aussi comme ces derniers. Par contre ils travaillent leurs terres la nuit et ils dorment le jour. De même ils utilisent un langage tout à fait opposé à celui des vivants: « laid » signifie « beau », « émoussé » signifie « aiguisé » etc… Mang Lung ressemble à notre monde mais il est tout à fait inversé. Lorsqu’il fait nuit, c’est le jour à Mang lung. Les maisons y ont des pilotis pointés vers le haut et le toit vers le bas. La durée de vie d’un esprit est aussi limitée car elle se termine aussi par la mort. L’esprit se transforme alors au bout de quarante ou cinquante ans en une goutte de rosée (dak ngop) qui se dissout dans la terre. C’est ainsi que se termine un cycle de vie fermé: terre-homme-esprit-terre. Il n’y a que la souveraine-génie (Bia Brôu) qui a le soin de superviser la naissance de nouvelles créatures en façonnant des enfants avec de la terre et en les introduisant dans les matrices des femmes enceintes.

Pour les Bahnar, un cycle de vie est composé de deux existences:

celle du monde des vivants et celle du monde des esprits.

En ce qui concerne la coiffure des Bahnar, on commence à voir souvent des hommes qui, en contact avec les Kinh et les étrangers, se coupent de plus en plus les cheveux. Normalement, l’homme bahnar enroule un turban d’étoffe et le passe dans le chignon. Par contre, une femme ne porte pas le turban et le remplace par un cordon ou un bandeau de perles de verroteries. C’est un acte de déclaration d’amour lorsqu’une fille dénoue en public le turban d’un jeune homme ou lorsqu’un homme offre à la femme ou à la fille du tabac ou une chique sortie de sa pipe. 

La vie des Bahnar est régie par un cycle annuel traditionnel avec dix mois pour la production agricole et deux mois consacrés aux festivals et aux activités variées du village: mariage, réparation ou construction de la maison, confection des vêtements etc… Dans leur société traditionnelle, la notion d’argent n’a aucune signification importante. Leurs produits de valeur tels que les gongs, les jarres, les buffles, les éléphants, les chevaux étaient utilisés comme les objets de troc dans le passé. Leur richesse se mesure au nombre de gongs, de jarres, d’esclaves trouvés dans chaque famille. Les Bahnar font du riz la base de leur nourriture. Il est cuit à l’étouffée ou à la vapeur. On remplit du riz et d’eau dans un gros bambou qu’on suspend au dessus du feu. En carbonisant le récipient, cela permet de cuire le riz. Ils se servent du riz gluant pour fabriquer une boisson fermentée (ou alcool de riz)( rượu cần en vietnamien). Ils absorbent ce liquide au moyen de longues pipettes en bambou. Ils ajoutent de l’eau lorsque le niveau du liquide baisse. Il est évident que la boisson est de moins en moins concentrée avec cet ajout.  

Les Bahnar de deux sexes se percent souvent les lobes pour porter des boucles d’oreilles mais ils ne se les distendent pas pour porter de gros anneaux comme les autres ethnies de la région. Vers quatorze ou quinze ans, ils se font araser les dents. Cette coutume de l’arasement des dents est en décroissance au fil des années. Par contre, le tatouage n’est pas pratiqué. Pour les garçons, à l’âge où ils commencent à aider leur père dans les champs, ils sont obligés d’aller coucher à la maison communale car c’est ici qu’ils reçoivent la formation, le maniement des armes et l’enseignement assumés par les anciens du village pour l’apprentissage de la vie. Ils ne peuvent rentrer qu’à la maison paternelle pour manger ou pour être soigné en cas de maladie.dantoc_bana

Chez les Bahnar, on constate que le couple des mariés n’adhère ni à la patrilocalité ni à la matrilocalité. C’est une question de convenance liée à la décision du couple. Par contre il y a une répartition de travail dans le couple: le mari s’occupe des affaires du village tandis que la femme prend en charge tous les travaux de la maison. Chez les Bahnar, on est libre de choisir son époux ou son épouse. Le mariage peut être célébré quand chacun des futurs répond aux conditions suivantes:

1°) Ils sont d’âge à cultiver un champ ( 15 à 16 ans). C’est une condition préalable pour nourrir leur famille car personne n’est prête d’apporter l’assistance même leurs parents.
2°) Il est obligatoire de contracter le premier mariage pour une jeune fille même si elle dépasse le cap de trente ans. Par contre elle peut être épousée soit comme femme de premier rang soit femme de second rang. Mais pour un veuf, un célibataire ou un divorcé, il n’est pas possible de contracter de mariage de second rang.
3°) Il n’existe pas de liens de parenté entre les futurs. C’est le cas où le consentement des parents est refusé lorsque le lien est prouvé. D’une manière générale, la participation des parents a pour but de s’assurer que les principes de tradition sont respectés. 

Lire la suite (Tiếp theo)

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.