Les chiffres Yin et Yang des Vietnamiens (Con số Âm Dương của người Việt)

 

Version vietnamienne

On est habitué à dire en vietnamien : sống chết đều có số cả (Chacun a son jour J pour la vie comme pour la mort).
Ði buôn có số, ăn cỗ có phần (On a sa vocation au commerce comme on a sa part au festin). Dans la vie courante, chacun a sa taille pour ses vêtements et pour ses chaussures. On s’aperçoit que contrairement aux Chinois qui adorent les nombres pairs, les Vietnamiens privilégient plutôt les nombres impairs (sô’ dương) que les nombres pairs (sô’ âm). 

On trouve l’utilisation fréquente des nombres impairs dans les locutions vietnamiennes : ba mặt một lời ( On a besoin d’être face à face en présence d’un témoin), ba hồn bảy vía ( trois âmes et 7 supports vitaux pour les hommes càd on est paniqué), Ba chìm bảy nổi chín lênh đênh ( très mouvementé), năm thê bảy thiếp ( avoir 5 épouses et 7 concubines càd avoir plusieurs femmes ), năm lần bảy lượt (plusieurs fois), năm cha ba mẹ ( hétéroclite), ba chóp bảy nhoáng (avec précipitation et sans soin ), Môt lời nói dối , sám hối 7 ngày (Une parole mensongère équivaut à sept jours de repentance), Một câu nhịn chín câu lành (Eviter une phrase vexante c’est avoir 9 phrases aimables) etc … ou celle des entiers multiples du nombre 9 : 18 (9×2) đời Hùng Vương ( 18 rois légendaires Hùng Vương ), 27 (9×3) đại tang 3 năm (27 tháng)(ou un deuil porté sur trois ans qui se traduit en fait par 27 mois seulement), 36 (9×4) phố phường Hànội (Hànội avec 36 quartiers ) etc.. On n’oublie pas de citer non plus les chiffres 5 et 9 ayant chacun un rôle très important. Le chiffre 5 est le chiffre le plus mystérieux car tout commence à partir de ce nombre. Le Ciel et la Terre ont les 5 éléments ou agents (Ngũ hành) donnant naissance aux mille choses et êtres. Il est placé au centre du Plan du Fleuve et de l’Ecrit de la rivière Luo qui sont à la base de la mutation des 5 éléments (Thủy, Hỏa, Mộc, Kim, Thổ)( Eau, Feu, Bois, Métal et Terre).

Il est associé à l’élément Terre dans la position centrale dont le paysan a besoin pour permettre de connaître la direction des points cardinaux. Cela revient ainsi à l’homme le centre dans la gestion des choses et des espèces et des quatre cardinaux. C’est pour cette raison que dans la société féodale, cette place est réservée  au roi car c’est lui qui a gouverné les gens. En conséquence, le chiffre 5 lui appartenait ainsi que la couleur jaune symbolisant la Terre. Cela explique la couleur qu’ont choisie les empereurs vietnamiens et chinois pour leurs habits.

Ho Tou Lo Chou

(Hà Đồ Lạc Thư)

Outre le centre occupé par l’homme, un animal symbolique est associé à chacun des quatre points cardinaux: le Nord par la tortue, le Sud par le phénix, l’Est par le tigre et l’Ouest par le dragon. Rien n’est étonnant de trouver au moins dans cette attribution les trois animaux vivant dans une région où la vie agricole joue un rôle considérable et l’eau est vitale. C’est le territoire des Bai Yue. Même un dragon si méchant dans d’autres cultures devient un animal gentil et noble imaginé par les peuples pacifiques des Bai Yue. Le chiffre 5 est connu encore sous le nom « Tham Thiên Lưỡng Đia » (ou ba Trời hai Ðất ou 3 Yang 2 Yin) dans la théorie du Yin et du Yang car l’obtention du nombre 5 provenant de l’assemblage des chiffres 3 et 2 correspond mieux au pourcentage raisonnable du Yin et du Yang que celle résultant de l’assemblage des chiffres 4 et 1.

Dans ce dernier, on s’aperçoit que le nombre Yang 1 est dominé beaucoup par le nombre Yin 4. Ce n’est pas le cas de l’assemblage des nombres 3 et 2 où le nombre Yang 3 domine légèrement le nombre (Yin) 2. Cela favorise le développement de l’univers dans une harmonie presque parfaite. Autrefois, le cinquième jour, le quatorzième jour (1+4=5) et le vingt-troisième jour (2+3=5) du mois étaient  réservés pour la sortie du roi. Il était interdit aux sujets de faire le commerce durant son déplacement et de troubler sa promenade. C’est peut-être la raison qui explique qu’un grand nombre de Vietnamiens d’aujourd’hui, influencés par cette tradition ancestrale continuent à ne pas choisir ces jours pour la construction des maisons, pour le voyage et pour les achats importants.On est habitué à dire en vietnamien : 

Chớ đi ngày bảy chớ về ngày ba
Mồng năm, mười bốn hai ba
Đi chơi cũng lỗ nữa là đi buôn
Mồng năm mười bốn hai ba
Trồng cây cây đỗ, làm nhà nhà xiêu

Il faut éviter de partir le 7ème jour et de rentrer le 3ème jour du mois. Pour le 5ème, le 14ème et le 23ème jour du mois, vous seriez perdant si vous faites une sortie ou le commerce. De même vous verriez la chute de l’arbre ou l’inclinaison de votre maison si vous le plantez ou vous la construisez.

Le chiffre 5 est cité fréquemment dans l’art culinaire vietnamien. La sauce la plus typique des Vietnamiens reste la saumure de poisson. Dans la préparation de cette sauce nationale, on note la présence de 5 saveurs classées selon les 5 éléments du Yin et du Yang: mặn ( salée ) avec le jus de poisson (nước mắm), đắng (amère) avec le zeste du citron (vỏ chanh), chua (acide) avec le jus du citron (ou du vinaigre), cay (piquante) avec les piments pilés en poudre ou coupés en miettes et ngọt (sucrée) avec du sucre en poudre. Ces cinq saveurs ( mặn, đắng, chua, cay, ngọt ) combinées et trouvées dans la sauce nationale des Vietnamiens correspondent respectivement aux 5 éléments définis dans la théorie de Yin et de Yang (Thủy, Hỏa , Mộc , Kim Thổ)(Eau, Feu , Bois, Métal et Terre ).

De même, on retrouve ces 5 saveurs dans le potage aigre-doux (canh chua) préparé avec du poisson: acide avec les graines de tamarin ou avec le vinaigre, sucré avec les tranches d’ananas, piquant avec les piments coupés en lamelles, salé avec le jus de poisson et amère avec quelques gombos (đậu bắp) ou avec les fleurs de fayotier (bông so đũa). Au moment où ce potage est servi, on lui ajoutera quelques herbes parfumées comme le panicaut (ngò gai), rau om (herbe ayant la flaveur proche de la coriandre avec une note citronnée en plus). C’est un trait caractéristique du potage aigre-doux du Sud-Vietnam et différent de ceux trouvés dans les autres régions du Vietnam.

On ne peut pas oublier de citer le gâteau de riz gluant que les Proto-Vietnamiens avaient réussi à léguer à leurs descendants au fil des millénaires de leur civilisation. Ce gâteau est la preuve intangible de l’appartenance de la théorie du Yin et du Yang et de ses cinq éléments aux Cent Yue dont les Proto-Vietnamiens faisaient partie car on retrouve dans la confection de ce gâteau le cycle d’engendrement de ces 5 éléments.

(Feu->Terre->Métal->Eau->Bois)

A l’intérieur du gâteau, on trouve un morceau de viande de porc de couleur rouge (le Feu) entouré par une sorte de pâte faite avec des fèves de couleur jaune (la Terre). Le tout est enveloppé par le riz gluant de couleur blanche (le Métal) pour être cuit avec de l’eau bouillante (l’Eau) avant de trouver une coloration verte sur sa surface grâce aux feuilles de latanier (le Bois).

Il y a un autre gâteau qui ne peut pas être manquant dans les mariages. C’est le gâteau susê ou phu-Thê (mari-femme) ayant la forme ronde à l’intérieur et enveloppé par des feuilles de bananier (couleur verte) en vue de lui donner l’apparence d’un cube ficelé avec un ruban de couleur rouge. Le cercle est placé ainsi à l’intérieur du carré (Dương trong âm)(Yang dans Yin). Ce gâteau est composé de la farine du tapioca, parfumé au pandan et parsemé de graines de sésame (vừng đen) de couleur noire. Au cœur de ce gâteau se trouve une pâte faite avec des haricots de soja cuits à la vapeur (couleur jaune), de la confiture des graines de lotus et de la noix de  coco râpée (couleur blanche). Cette pâte  ressemble énormément à la frangipane trouvée dans les galettes des rois. Sa texture collante rappelle le lien fort qu’on veut représenter dans l’union. Ce gâteau est le symbole de la perfection de l’amour conjugal et de la loyauté en accord parfait avec le Ciel et la Terre et les 5 éléments symbolisés par les cinq couleurs (rouge, verte, noire, jaune et blanche).

Ce gâteau est relaté par le conte suivant : autrefois, il y avait un commerçant s’adonnant aux débauches et ne pensant pas à retourner à la famille bien qu’avant son départ, sa femme lui donnât le gâteau susê et promît  de rester chaleureuse et doucereuse comme le gâteau. C’est pourquoi ayant appris cette nouvelle, sa femme lui envoya d’autres gâteaux phu thê accompagnés par les deux vers suivants :

Từ ngày chàng bước xuống ghe
Sóng bao nhiêu đợt bánh phu thê rầu bấy nhiêu

Depuis ton départ, autant des vagues étaient rencontrées par ton embarcation, autant d’afflictions étaient connues par le gâteau susê.

 
Lầu Ngũ Phụng

Dans l’architecture, le chiffre 5 n’est pas oublié non plus. C’est le cas de la porte méridienne de la citadelle de Huế qui est un puissant massif en maçonnerie percé de cinq passages et surmonté d’une élégante structure de bois à deux niveaux, le Belvédère des Cinq Phénix (Lầu Ngũ Phụng). 

Vu dans l’ensemble,  celui-ci  ressemble à  un groupement   de 5 phénix juchés intimement avec leurs ailes déployées. Ce belvédère possède cent colonnes en bois  de fer et peintes  en rouge permettant de supporter ses neuf toitures. Ce chiffre 100 a été  bien examiné par les spécialistes vietnamiens. Pour l’archéologue renommé Phan Thuận An, il correspond exactement au nombre total obtenu par l’addition des deux nombres trouvés respectivement dans le plan du Fleuve (Hà Ðồ) et l’Ecrit de la rivière Luo (Lạc thư cửu tinh đồ) et symbolisant ainsi l’harmonie parfaite de l’union du Yin et du Yang. Ce n’est pas l’avis d’un autre spécialiste Liễu Thượng Văn. Selon ce dernier, cela représente la force de 100 familles ou du peuple (bách tính) et reflète bien la notion dân vi bản (prendre le peuple comme base) dans la gouvernance de la dynastie des Nguyễn. La toiture du pavillon central est couverte de tuiles jaunes « lưu ly », les autres de tuiles bleues « lưu ly ». La porte principale, juste au milieu, c’est la porte méridienne (Ngọ Môn) pavée de pierres « Thanh » teintées en jaune, et consacrée au passage du roi. Des deux côtés, on trouve la porte de Gauche et la porte de Droite (Tả, Hữu, Giáp Môn) réservées aux mandarins civils et militaires. Puis les deux autres portes latérales Tả Dịch Môn và Hữu Dịch Môn sont prévues pour les soldats et les chevaux. C’est pourquoi on est habitué à dire en vietnamien :

Ngọ Môn năm cửa chín lầu
Một lầu vàng, tám lầu xanh, ba cửa thẳng, hai cửa quanh

La porte méridienne  possède 5 passages et neuf toitures dont l’une est vernissée en jaune et les 8 huit autres en vert. Il y a trois portes principales et deux latérales.

A l’est et à l’ouest de la citadelle, on trouve la Porte de l’Humanité et la Porte de la Vertu qui sont réservées respectivement pour les hommes et les femmes.
Le chiffre 9 est un nombre Yang (ou impair). Il représente la puissance du yang à son maximum et il est difficile de l’atteindre. C’est pourquoi autrefois l’empereur s’en servit souvent pour montrer sa puissance et sa suprématie. Il monta les neuf marches symbolisant l’ascension de la montagne sacrée où se trouvait son trône. Selon l’on-dit, la cité interdite de Huế comme celle de Pékin possédait 9999 pièces. Il est utile de rappeler que la cité interdite de Pékin a été supervisée par un Vietnamien de nom Nguyễn An exilé très jeune à l’époque des Ming. L’empereur comme chacun de ses palais, est tourné face au sud, à l’énergie Yang, afin que l’empereur reçoive le souffle vital du soleil car il est le fils du Ciel. Au Vietnam, on trouve les neuf urnes dynastiques de la citadelle de Huê, les neuf branches du fleuve Mékong, les neuf toitures du belvédère des Cinq Phénix etc…Dans le conte intitulé « Le génie des Montagnes et le génie des Fleuves (Sơn Tinh Thủy Tinh) », le dix-huitième (2×9) roi Hùng Vương proposa pour la dot du mariage de sa fille Mị Nương: un éléphant à 9 défenses, un coq à 9 ergots et un cheval à 9 crinières rouges. Le chiffre 9 symbolise le Ciel dont la date de naissance est le neuvième jour du mois Février.

Moins importants que les chiffres 5 et 9, le chiffre 3 (ou Ba ou Tam en vietnamien) est lié étroitement à la vie quotidienne des Vietnamiens. Ceux-ci n’hésitent pas à l’évoquer dans un grand nombre d’expressions populaires. Pour signifier une certaine limite, un certain degré, ils ont l’habitude de dire:

Không ai giàu ba họ, không ai khó ba đời:
Nul ne peut prétendre s’enrichir jusqu’aux trois générations comme nul n’est  exigeant jusqu’aux trois vies successives.

Il  arrive souvent   aux Vietnamiens de ne pas accomplir une certaine chose en une seule fois, ce qui les oblige d’effectuer l’opération jusqu’à trois fois. C’est l’expression suivante qu’ils emploient fréquemment: Nhất quá Tam. C’est le chiffre trois, une limite qu’ils ne souhaitent pas outrepasser dans l’accomplissement de cette tâche. Pour dire que quelqu’un est irresponsable, ils le désignent sous le vocable « Ba trợn« . Celui qui est opportuniste est appelé Ba phải. L’expression  » Ba đá  » est réservée aux gens vulgaires tandis que ceux qui ne cessent pas de s’enchevêtrer dans de petites affaires ou des ennuis interminables reçoivent le titre  » Ba lăng nhăng« . Pour soupeser ses paroles, le Vietnamien a besoin de plier les trois pouces de sa langue. ( Uốn Ba tấc lưỡi ) . 

Le chiffre Trois est synonyme aussi de quelque chose d’insignifiant et sans importance. C’est ce qu’on trouve dans les expressions populaires suivantes:

Ăn sơ sài ba hột: Manger peu. (Manger simplement trois grains).
Ăn ba miếng: idem
Sách ba xu: Bouquin sans valeur. (le bouquin ne valant que trois sous).
Ba món ăn chơi: Quelques plats à goûter. (Trois plats pour se divertir)

Analogue au chiffre 3, le chiffre 7 est cité souvent dans la littérature vietnamienne. On ne peut pas ignorer non plus l’expression Bảy nỗi ba chìm với nước non (Je surnage 7 fois et je sombre trois fois si on la traduit textuellement) que la poétesse Hồ Xuân Hương a employée et immortalisée dans son poème intitulé « Bánh trôi nước » :

Thân em vừa trắng lại vừa tròn
Bây nỗi ba chìm với nước non
……….
pour décrire les difficultés rencontrées par la femme vietnamienne dans une société féodale et confucéenne. Celle-ci n’épargnait pas non plus ceux qui avaient un esprit d’indépendance, de liberté et de justice. C’est le cas du lettré engagé Cao Bá Quát dégoûté de la scolastique de son époque et rêvant de remplacer la monarchie autoritaire des Nguyễn par une monarchie éclairée. Taxé d’être l’auteur de l’insurrection des Sauterelles (Giặc Châu Chấu) en 1854, il fut condamné à mort et n’hésita pas à donner jusqu’à  avant son exécution, sa réflexion sur le sort réservé à ceux qui osaient critiquer le despotisme et la société féodale dans son poème :

Ba hồi trống giục đù cha kiếp
Một nhát gươm đưa, đéo mẹ đời.
Trois coups de gong sont pour ce sort misérable
Une tranche de sabre achève cette vie de chien.

Si la théorie du Yin et du Yang continue à hanter leur esprit pour son caractère mystique et impénétrable, elle reste néanmoins un mode de pensée et de vie auquel un bon nombre des Vietnamiens ne renoncent pas à se référer quotidiennement pour les pratiques courantes et le respect des us et des traditions ancestrales.


Bibliographie

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-Richard Wilhelm : Histoire de la civilisation chinoise 1931
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-Jacques Lemoine : Mythes d’origine, mythes d’identification. L’homme 101, paris, 1987 XXVII pp 58-85
-Fung Yu Lan: A History of Chinese Philosophy ( traduction vietnamienne Đại cương triết học sử Trung Quốc” (SG, 1968).68, tr. 140-151)).
-Alain Thote: Origine et premiers développements de l’épée en Chine.
-Cung Ðình Thanh: Trống đồng Ðồng Sơn : Sự tranh luận về chủ quyền trống
đồng giữa h ọc giã Việt và Hoa.Tập San Tư Tưởng Tháng 3 năm 2002 số 18.
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-Ballinger S.W. & all: Southeast Asian mitochondrial DNA Analysis reveals genetic continuity of ancient Mongoloid migration, Genetics 1992 vol 130 p.139-152….

The Bai Yue ( Bách Việt)

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French version

Vietnamese version

The Bai yue were probably the heirs of  Hoà Bình culture, a discovery extremely important from French archeologist Madeleine Colani in the Hoa Bình province (Vietnam). They were a people of skilled farmers: They grew rice on burned land and flooded fields and raised buffaloes and pigs. At the time of the first contact with the nomad folks from the North of Turco-Mongolian origin,  ancestors of the Han (or Chinese) called them by the name of « Yue ». There are people having the habit of using the ax in rice cultivation and in the fighting. The ancestors of the Vietnamese (or the Luo Yue) were part of these Bai Yue, owners of the bronze drums.

The Bai Yue (or Bách Việt in Vietnamese) lived scattered in the south of the Blue River basin (or Dương Tử Giang), from Zhejiang (Triết Giang) until Jiaozhi ( Giao Chỉ )( the northern Việt-Nam today ). They were devoted to rice cultivation and distinguished themselves from Chinese people accustomed to cultivate millet and wheat. They drank infused water with the leaves of a plant known as « tea » they gathered in the forest. They liked dancing, working while singing and alternated their reply in the songs. They often disguised themselves in the dance with leaves and plants. They were found at that time in the current provinces of Southern China: Foujian (Phúc Kiến), Hunan(Hồ Nam), Guizhou (Qúi Châu), Guangdong (Quảng Ðông), Jiangxi, Guangxi ( Quảng Tây), Yunnan (Vân Nam) and in the northern Vietnam today.

Bronze drum shown in Guimet museum (Paris)

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Characteristic features of the Bai Yue

1°) The practice of cutting hair short and tattooing.
2°) The construction of houses on piles ( construction Ganlan ).
3) Dress in loincloth and turban.
4) Blackening or grinding front teeth ( canine teeth )
5) Eating clams and amphibians in diet.
6) Bronze casting and using bronze drums in rituals.
7) Foretelling future using bird bones
8) Totemic cult (birds, reptiles and amphibians)
9) Practice burying on cliffs
10°) Greater involvement by fathers in their son’ birth and education and the return of the woman in rice acitivities.
11°) A highly developed technology of weaving
12°) Intensive use of small boats and expertise in the art of maritime warfare.

 

Đại tộc Bách Việt

Théorie du Yin et du Yang (Âm Dương: 1ère partie)

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Vietnamese version

La théorie du Yin et du Yang continue à être liée intimement à la vie journalière des Vietnamiens et  trouve son application dans tous les domaines. Est de nature Yin tout ce qui est fluide, froid, humide, passif, sombre, intérieur, immobile, d’essence féminine comme le ciel, la lune, la nuit, l’eau, l’hiver. Est de nature Yang tout ce qui est solide, chaud, lumineux, actif, extérieur, mobile, d’essence masculine comme la terre, le soleil, le feu, l’été.

On retrouve même ce caractère Yin et Yang dans la grammaire vietnamienne par l’utilisation des mots « con » et « cái». 

Analogues aux articles définis « le » et « la », ceux-ci sont employés pour indiquer dans certains cas restreints le genre mais on peut se baser sur le caractère « mobile » ou « immobile » de l’objet qu’ils accompagnent pour indiquer son appartenance à la classe sémantique correspondante. Le mot cái est utilisé dans le cas où l’objet porte le caractère « immobile » (tĩnh vật) : cái nhà (maison), cái hang (grotte), cái nồi (marmite) etc… Par contre, lorsque l’état « mobile » (động vật) fait partie de la nature de l’objet, on se sert du mot « con » pour le précéder. C’est le cas des mots suivants : con mắt (œil), con tim (cœur), con trăng (couleuvre), con ngươi (pupille), con dao (couteau) etc …

L’œil bouge sans cesse comme le cœur palpite. De même la couleuvre se meut ainsi que la pupille. Le couteau est considéré par les Vietnamiens comme un animal sacré. Il est nourri avec du sang, du vin et du riz. Le même nom que porte un objet peut aboutir à deux interprétations différentes en fonction de l’utilisation du mot «cái» ou «con». L’exemple suivant traduit le caractère mobile (con) ou immobile (cái) de l’objet thuyền (ou barque en français) employé: Con thuyền trôi theo dòng nước (La barque s’avance sur l’eau). Cela veut dire que quelqu’un fait avancer la barque avec la rame ou avec le moteur. Par contre, lorsqu’on dit « cái thuyền trôi theo dòng nước « (La barque s’avance sur l’eau), on insiste sur le fait qu’il n’y a personne pour manœuvrer la barque. C’est le flot des eaux qui fait avancer la barque toute seule. Cela note le caractère immobile de la barque. L’influence du Yin et du Yang, n’est pas étrangère à la façon d’attribuer parfois le sexe à des objets courants. C’est le cas du couteau (dao) : dao cái (grand couteau), dao đực ou dao rựa (ou machette). Cette remarque a été notifiée par Alain Thote, l’archéologue et sinologue français, dans son article intitulé « Origine et premiers développements de l’épée en Chine » : Les épées de Yue ont joui dans l’Antiquité d’une très grande célébrité. C’est le cas de  l’épée des entrailles de poisson que le boucher de nom  Zhuan Zhu (Chuyên Chư) a utilisée  pour assassiner le souverain Liao ( Ngô Vương Liêu)  de l’état de Wu (nước Ngô) à l’époque des Printemps et Automnes (Xuân Thu) etc …Certaines épées portaient un nom et  pouvaient être de sexe masculin ou féminin. L’expression « đực rựa » qu’on entend évoquer souvent dans les conversations pour désigner les hommes, provient de la coutume des Vietnamiens d’autrefois de porter les machettes lors de leur sortie. 

L’association des sexes est visible aussi depuis longtemps au Vietnam dans la riziculture : l’homme laboure et la femme repique. Le soc de la charrue qui transperce la terre (âm)(Yin) symbolise le sexe mâle ( Yang)(dương) tandis que par le repiquage la femme transmet son pouvoir de fécondation (âm)(Yin) aux plants de riz (dương)(Yang). Pour noter la parfaite perfection dans l’union harmonieuse du Yin et du Yang, on est habitué à dire en vietnamien : Unis, mari et femme parviennent à écoper toute l’eau de la mer d’Orient. (thuận vợ thuận chồng tát biển Đông cũng cạn).

Étant riziculteurs, les Proto-Vietnamiens étaient attachés non seulement au sol mais aussi à l’environnement car grâce aux phénomènes naturels (pluie, soleil, vent, nuages etc …), ils pouvaient avoir de bonnes récoltes ou non. La riziculture extensive sur brûlis ou en terrains naturellement inondés dépendait des aléas du climat. C’est pourquoi ils avaient besoin de vivre en harmonie avec la nature. Ils considéraient qu’ils étaient le trait d’union entre le Ciel et la Terre (Thiên-Nhân-Địa). Partant de cette notion, on est habitué à dire en vietnamien : Thiên Thời, Địa Lợi, Nhân Hòa (être au courant des conditions météorologiques, connaître bien le terrain et avoir l’adhésion populaire ou la concorde nationale). Ce sont les trois facteurs clés de la victoire auxquels ont fait référence souvent les stratèges vietnamiens (Trần Hưng Đạo, Nguyễn Trãi,  Quang Trung) dans leur lutte contre les envahisseurs étrangers. Les Vietnamiens tiennent compte de cette triade (Tam Tài) dans leur mode de pensée et dans leur vie journalière. Pour eux, il n’y a pas de doute que cette notion a une influence incontestable sur l’homme lui-même: son destin est dicté par la volonté du Ciel et dépend de sa date de naissance. Avec l’environnement extérieur et intérieur de son logement, il peut recevoir le souffle néfaste ou bénéfique (qi) que génère la terre. L’art d’harmoniser l’énergie environnementale de son lieu d’habitation lui permet de minimiser ses ennuis et de favoriser son bien-être et sa santé. Un terrain plat sans ondulations ni collines est sans vie et manque de souffle qi (Khí). Les Vietnamiens appellent les collines et les montagnes Dragons et Tigres. Les bâtiments devraient avoir un dragon vert à la direction ouest et un tigre blanc à  la direction est. Le Dragon bienveillant doit être plus puissant que le Tigre. (Hữu Thanh Long, Tã Bạch Hổ) càd la montagne Dragon doit être plus haute que la colline Tigre.  La notion d’harmonie prend tout son sens lorsqu’un site adossé à une montagne et entouré de deux côtés par des chaînes de collines permettant de le protéger des vents qui dispersent le Chi (ou énergie cosmique) donne accès à un lac ou à un fleuve où il y a l’eau et la nourriture indispensable à la vie et  le cumul des énergies cosmiques (Chi).

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Bai Yue (Bách Việt)

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Les Bai Yue étaient probablement les héritiers de la culture Hoà Bình  (9000-5600 av J.C.), une découverte extrêmement importante de la part de l’archéologue française Madeleine Colani dans la province Hoà Bình du Vietnam. Ils étaient un peuple d’agriculteurs avertis: ils cultivaient le riz en brûlis  et en champs inondé  et élevaient buffles et porcs. Au moment du contact avec les gens nomades du Nord d’origine turco-mongole, les ancêtres des Hán (ou Chinois), ils étaient appelés par ces derniers, sous le nom « les Yue ». Ceux-ci   vivaient disséminés au sud du bassin du fleuve bleu (ou Dương Tử Giang), de Zhejiang (Triết Giang) jusqu’au Jiaozhi (Giao Chỉ)(le Nord du Việt-Nam d’aujourd’hui)  avant l’ère chrétienne et  avaient l’habitude de se servir de la hache dans la riziculture et dans les combats. Les ancêtres des Vietnamiens (ou les Luo Yue) faisaient partie de ces Bai Yue, les propriétaires des tambours de bronze icon_tambour

 

Tambour de bronze exposé au musée Branly (Paris)

Ils se consacraient à la riziculture et se distinguaient des Chinois habitués à cultiver le millet et le blé. Ils buvaient de l’eau infusée avec les feuilles  d’une  plante   connue sous le nom « théier (trà) » qu’ils cueillaient dans la forêt. Ils aimaient danser, travailler tout en chantant et alterner des répliques dans les chants. Ils se déguisaient souvent dans la danse avec les feuilles des plantes. On les retrouva à cette époque dans les provinces actuelles de la Chine du Sud: Foujian (Phúc Kiến), Hunan (Hồ Nam), Guizhou ( Qúi Châu), Guangdong  (Quảng Ðông), Jiangxi (Giang Tây) , Guangxi (Quảng Tây) et Yunnan (Vân Nam) ainsi que dans le nord du Vietnam actuel.

Caractéristiques des Bai Yue

1°) La pratique de couper court les cheveux et le tatouage.
2°) La construction des maisons sur pilotis.  (construction Ganlan).
3°) La tenue en pagne et turban.
4°) Le noircissement ou la mutilation des dents de devant (dents canines).
5°) L’utilisation des palourdes et des amphibiens  dans leur régime alimentaire.
6°) Le moulage et l’utilisation rituelle des tambours de bronze.
7°) La divinisation effectuée avec les os des oiseaux et des volailles en particulier.
8°) Le culte totémique ( oiseaux, reptiles, et amphibiens).
9°) La pratique des enterrements sur les falaises.
10°) La participation active du père  dans la naissance  et  l’éducation de l’enfant et le retour de la mère aux activités rizicoles.
11°)  L’utilisation  intensive des barques et l’expertise dans l’art de guerre  maritime.
12°) La technique de tissage hautement développée.

 Version vietnamienne

Đại tộc Bách Việt


 

Đại tộc  Bách Việt có lẽ họ là  nhóm bộ tộc  thừa kế của  nền văn hóa Hòa Bình (9000-5600 TCN), một khám phá cực kỳ quan trọng của bà Madeleine Colani ở tỉnh Hòa Bình (Việtnam) . Họ    chuyên sống  về  nông nghiệp:  họ thường đốt nương trồng lúa trên rẫy hay  trên nước và nuôi bò và lợn. Lúc họ tiếp xúc  với những bộ tộc du mục ở phương bắc  thuộc góc Thổ-Mông, tổ tiên người Hán (hay người Hoa) thì họ được gọi bỡi các nhóm người nầy với cái tên Yuê (hay Việt). Đó là tên ám chỉ những dân tộc sống  ở phía nam  sông xanh Dương Tử Giang,  từ Triết Giang đến Giao Chỉ (miền bắc của nước Việt Nam ngày nay) từ thời trước công nguyên    và    thường dùng loại rìu để canh tác và giao chiến. Bộ tộc Lạc Việt (hay Lo Yue), tổ tiên của người Việt, cũng  thuộc về đại tộc Bách Vịệt, chủ nhân của trống đồng.  

Khác hẳn với dân tộc Hoa trồng kê và lúa mì, họ thì sống chuyên  nghề trồng lúa. Họ thường uống nước đun với một loại lá cây họ hái ở trong rừng mà họ thường gọi là trà. Họ  thích nhảy múa,  thường cải trang với lá cây  và  hát  đối đáp trong lúc làm việc.   Thời đó, họ thường định cư ở các tỉnh hiện nay thuộc về miền nam của Trung Quốc: Phúc Kiến, Hồ Nam, Quảng Đông, Giang Tây, Vân Nam và miền Bắc của nước Việt Nam.

Đặc tính của đại tộc Bách Việt

  1. Tục cắt tóc ngắn và xăm mình.
  2. Xây nhà sàn.
  3. Trang phục đặc trưng  với quần ngắn hay váy quấn và đầu đội khăn xếp .
  4. Tục nhuộm răng và nhổ răng ( răng nanh hoặc răng cửa trên).
  5.  Chế độ ăn nhiều sò hến và ếch.
  6. Đúc và sử dụng trống đồng trong các nghi lễ .
  7. Bói bằng xương chim, đặc biệt là xương gà.
  8. Thờ vật tổ, đặc biệt là chim, bò sát, và cóc hay ếch.
  9. Tục táng trên vách đá.
  10. Tục lệ người cha tham gia quá trình đỡ đẻ và chăm sóc con nhỏ sau đó để người mẹ trở lại với việc làm đồng.
  11. Sử dụng nhiều đến thuyền bè và điêu luyện về thủy chiến.
  12. Kỹ thuật dệt phát triển cao.